vendredi 25 novembre 2011

[Avis] Noé Tome 1 "Pour la Cruauté des Hommes" de Aronofsky, Handel et Henrichon aux éditions Le Lombard

Noé, descendant d'Adam, vit dans un monde désolé, aux terres arides et inhospitalières. La raréfaction des ressources y a exacerbé la barbarie enfouie au plus profond de l'Homme, et il serait bien temps qu'un châtiment arrive remette les choses en place. Noé souffre de visions, qui lui annoncent une grande catastrophe, sous la forme d'un déluge. Lui qui autrefois fut un Mage reconnu et influent, décide de tenter de prévenir ses congénères. Mais devant les railleries et la violence de ces derniers, il renonce à les sauver, persuadé que le but du Créateur est peut-être justement de les soumettre au jugement dernier... Noé se met en route pour le Mont Ararat, où il pourra se mettre à l'abri avec sa femme et ses enfants. De là bas, il pourra mettre en œuvre son choix: préserver les animaux. Mais pour rejoindre cet endroit, il doit traverser le domaine des Gardiens, ces géants qui ne portent guère l'Homme en leur coeur...

Pour la deuxième fois, après The Fountain, Darren Aronofsky, célèbre cinéaste, s'essaie à la BD. Cette fois-ci il nous en livre une à l'aspect très européen, aussi bien par le graphisme que par le découpage du dessinateur Niko Henrichon.

Noé est un album qui, à défaut d'être transcendant, se révèle d'une agréable lecture. Pour l'apprécier, il faut finalement s'intéresser à ce qu'Aronofsky tente de faire avec le mythe de Noé, qui est certainement un des personnages bibliques les plus connus, même pour les lecteurs athées et sans culture religieuse comme moi (cela m'a finalement certainement permis de mieux apprécier le scénario). On ne parle pas ici d'une adaptation littérale du mythe (encore heureux), mais plutôt d'une relecture de ce dernier.

(c) Aranofsky - Handel - Henrichon / Le Lombard
En lisant cet album, on subit un peu ce que j'appelle le syndrome Titanic, c'est à dire qu'on imagine un peu comment va se dérouler l'histoire. Donc, un peu à la manière du film de Cameron, c'est le chemin emprunté qui fait la différence. En l'occurrence, la transposition du mythe de Noé sur une Terre à la sauce médiévale-fantastique est assez réussie. On y trouve l'aspect grandiose à la fois dans le texte et dans les grandes cases faisant la part belle aux décors. Le clou est vraiment enfoncé par la qualité graphique de l'ensemble. Le trait d'Henrichon est superbe (par contre, pour parler purement de l'impression de l'ouvrage, on a le sentiment que la reproduction est parfois floue), sa mise en couleur l'est tout autant. Le monde qu'ont mis en place les auteurs parvient à faire oublier la dimension biblique de l'histoire, ce qui pour ma part est un critère de soulagement, car j'ai un peu de mal avec tout ce qui est religieux... Ceci dit, je trouve que le peu d'éléments bibliques qu'il reste, on aurait pu s'en passer. Car on croirait que l'on cherche à nous rappeler régulièrement qu'il s'agit bien de l'adaptation de l'histoire de Noé qu'on est en train de lire. Cela aurait tout aussi bien fonctionné en racontant l'histoire comme n'importe quelle autre, sans ces "panneaux de signalisation"... De toute manière, rien que le titre annonçait la couleur...

Autre aspect, dans l'air du temps: l'arrière-plan un peu écolo. L'histoire bénéficie d'une certaine résonnance contemporaine, en lien avec que ce l'Homme fait de sa planète, en épuisant la moindre de ses ressources. Heureusement, ce discours là n'est pas asséné lourdement, disons que c'est un petit plus qui apporte un peu de profondeur au propos, pour ceux qui en cherchent (bon et là, il ne fallait pas aller bien loin).

(c) Aranofsky - Handel - Henrichon / Le Lombard
En tout cas, la forte pagination de l'ensemble permet d'obtenir un premier tome bien construit, dont on a envie de connaître la suite, pour voir si finalement Aronofsky et Handel ne vont pas bifurquer un peu en cours de route, et prendre encore plus de liberté avec le mythe, histoire qu'on accroche un peu plus. J'ai beaucoup apprécié la dernière partie de l'album, qui me paraît être la plus inventive, avec une des plus belles séquences: la chute des anges sur Terre.

A noter pour l'anecdote que Noé était, jusqu'à il y a encore peu, une histoire que Darren Aronofsky projetait d'adapter au cinéma depuis un moment. Il avait semble-t-il choisit d'en faire une BD, faute de pouvoir en trouver le financement. Le Lombard a réalisé un bon coup en éditant cette BD (première mondiale en France, l'album ne sortant aux USA que l'année prochaine), et ils ont eu la chance côté timing, puisque début octobre, juste avant la parution de Noé chez nous, on a appris que la Paramount a signé un deal pour porter la BD à l'écran, avec un script repris sous la houlette de John Logan (Gladiator, Le Dernier Samouraï). Le but, apparemment, est de réaliser un film-catastrophe démesuré, à la "Roland Emmerich" (euh, bof la référence) dixit Aronofsky himself. En attendant, la BD s'étalera sur quatre albums, dont le dernier devrait paraître en 2014. Le film quant à lui, devrait entrer en production au printemps 2012, avec une sortie envisagée pour l'été 2013.


Pour terminer, une bande-annonce promo pour ce tome 1 de Noé:


Note finale:
Une relecture du mythe de Noé assez réussie, qui vaut pour le moment le détour surtout d'un point de vue graphique, le scénario ne devenant vraiment prenant que sur le dernier quart de l'album. Ceci dit, cela préfigure d'un second album intéressant si la suite reste de cet acabit.

2 commentaires:

Fif a dit…

Je suis justement en train de le lire...

Menrad a dit…

Je pense que ça peut faire partie des trucs à surveiller. En tout cas, j'ai beaucoup aimé le travail d'Henrichon.

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